Carrefour Kairos - Site personnel d`Hermann Giguèrehttp://www.hgiguere.net/2024-03-29T13:44:31+01:00Webzine Maker46.814776-71.2http://www.hgiguere.net/favicon.icohttp://www.hgiguere.net/var/style/logo.jpg?v=1219314725Homélie pour la fête de la Toussaint Année A « Une grande nuée de témoins »2022-11-01T18:36:00+01:00http://www.hgiguere.net/Homelie-pour-la-fete-de-la-Toussaint-Annee-A-Une-grande-nuee-de-temoins_a975.htmlhttp://www.hgiguere.net/photo/art/imagette/48955066-38234018.jpg2020-10-27T18:00:00+01:00Hermann Giguère
L'évangile de cette fête nous fait relire les Béatitudes en Mathieu 5, 1-12a qui sont le chemin incontournable de la sainteté, la « carte d'identité du chrétien » comme l'a écrit le pape François dans son Exhortation apostolique sur la sainteté intitulée Gaudete et Exultate publiée le 9 avril 2018.
Dans cette Exhortation, le pape François nous invite à considérer « la grande nuée de témoins » qui nous incitent à continuer de marcher vers la sainteté. « Et parmi eux, écrit-il, il peut y avoir notre propre mère, une grand-mère ou d’autres personnes proches (cf. 2 Timothée 1, 5). Peut-être leur vie n’a-t-elle pas toujours été parfaite, mais, malgré des imperfections et des chutes, ils sont allés de l’avant et ils ont plu au Seigneur. » (GE 3) Il les appelle « les saints de la porte d’à côté » ou « la classe moyenne de la sainteté » (GE 7).
I – Le sens de la fête de la Toussaint
Vous le voyez cette fête de la Toussaint qui arrive un dimanche cette année nous permet de nous associer de façon particulière aux saintes et saints connus et inconnus, à l’Église du ciel. Comme membres de l’Église ici-bas, sur terre, qui est le Corps mystique du Christ, nous ne sommes pas isolés. Nous sommes en lien continu et permanent avec nos frères et sœurs dans le Christ, non seulement avec ceux et celles qui sont sur la terre mais avec tous ceux et celles qui nous ont précédés et qui jouissent maintenant de la vie éternelle auprès de Dieu au ciel qu'on appelait autrefois l'Église triomphante.
Cette réalité merveilleuse de la « communion des saints » comme nous le confessons dans le Je crois en Dieu à chaque dimanche est au cœur de notre foi. Le christianisme, à l’inverse de plusieurs religions orientales qui se centrent sur la personne et son bien-être physique et spirituel, le christianisme, dis-je, est une religion de communion. Ce terme est parfois galvaudé et a servi à toutes les sauces, mais pour nous la communion n’est pas seulement le geste de partager le Corps du Christ à la messe. C’est beaucoup plus que cela et c’est des plus stimulants pour nous croyants et croyantes.
En effet, l’Église, Corps mystique du Christ, est d’abord et avant tout un rassemblement de communion dans la même foi et dans les mêmes liens. Comme le dit Saint Paul, il y a une seule foi, un seul baptême. « Comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il y a un seul Corps et un seul Esprit, écrit-il aux Éphésiens. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, au-dessus de tous, par tous, et en tous. » (Éphésiens 4, 4-6)
La fête de la Toussaint fait lever nos regards vers cette multitude de personnes baptisées de toutes races, de toutes langues, de toutes nations, fils adoptifs et filles adoptives par la grâce divine et participants de la vie trinitaire. Dieu les connaît par leur nom car c’est lui qui les a appelés. Ils sont nos frères et soeurs rendus à la maison du Père et vivants pour Dieu éternellement avec le Christ ressuscité ( cf. Romains 6, 10-11 ).
II – Qui sont les saints et les saintes que nous fêtons à la Toussaint ?
Cette nué de saints et saintes de la Toussaint nous permet de regarder avec joie autour de nous et de voir, en particulier, les traces de Jésus chez des personnes que l’Église nous présente officiellement comme modèles en les canonisant. Le pape saint Jean- Paul II a voulu le manifester en canonisant au cours de ses voyages des personnes de toutes les contrées qu’il visitait comme aux Indes ou en Palestine. Au cours de son pontificat, il a ainsi procédé à plus de 1,300 béatifications et près de 500 canonisations. Hé oui! L’Église, par des gestes officiels reconnaît certaines personnes comme saintes en les proposant à notre vénération. Elle le fait parce qu’ils ont déjà reçu une reconnaissance de leur sainteté de leur vivant comme Marie de l’Incarnation et François de Laval au Québec qui ont été reconnus saints en 2014.
Outre ces saints et saintes canonisés, la fête de la Toussaint nous fait vénérer en bloc, comme le dit si bien le pape François, ceux et celles qu’il appelle les « les saints de la porte d’à côté » ou « la classe moyenne de la sainteté », car pour imiter Jésus il n’est pas nécessaire d’attirer l’attention. Comme le dit si bien le concile Vatican II lorsqu’il décrit l’appel universel à la sainteté dans la Constitution sur l’Église au chapitre cinq qui porte ce titre : « Tous les fidèles du Christ sont donc invités et tenus à chercher et à atteindre la sainteté et la perfection propres à leur état ». C’est dans la vie de tous les jours que les chrétiens arrivent à la sainteté qui est l’imitation de Jésus.
III - Application
Profitons de cette belle fête de la Toussaint pour laisser nos cœurs s’enflammer du même amour que ces saints et saintes, inconnus ou vénérés officiellement, qui nous ont précédés. Il est bon de les célébrer. car en le faisant c’est la richesse de la grâce de Dieu que nous reconnaissons. Elle se manifeste, en effet, sans relâche au cours des âges dans toutes les situations et dans tous les états de vie.
Si les saintes et les saints canonisés sont souvent issus de communautés religieuses, cela ne doit pas nous cacher le fait qu’elles sont très nombreuses les personnes saintes sans nom et qu’elles sont pour nous des modèles aussi bien que les premiers.
Conclusion
Notre célébration ce matin est une belle occasion de vivre la proximité avec tous les saints et saintes et de nous laisser inspirer par Dieu les gestes qui nous permettront de les rejoindre un jour dans la gloire du Père en union avec Jésus Ressuscité.
Bonne fête de la Toussaint!
Amen!
Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l'Université Laval
Séminaire de Québec
Dès le IVe s. l'Église syrienne consacrait un jour à fêter tous les martyrs dont le nombre était devenu si grand qu'il rendait impossible toute commémoration individuelle. Trois siècles plus tard, dans son effort pour christianiser les traditions païennes, le pape Boniface IV transformait un temple romain dédié à tous les dieux, le Panthéon, en une église consacrée à tous les saints.
La coutume de fêter tous les saints ensemble se répandit en Occident, mais chaque Église locale les fêtait à des dates différentes, jusqu'en 835, où elle fut fixée au 1er novembre. Dans l'Église byzantine, c'est le dimanche après la Pentecôte qui est consacré à la fête de tous les saints.
Monsieur le cardinal,
Chers séminaristes,
Lorsque j’étais séminariste, j’adorais la lecture de la vie des saints. Déjà avant d’entrer au Grand Séminaire, j’avais lu la vie de Charles de Foucauld, de Guy de Larigaudie, de Dominique Savio, de Pier-Giorgio Frassati, de Stanislas Kostka, de Louis de Gonzague sans oublier celle des martyrs ougandais en Afrique ou des martyrs de Nagasaki au Japon.
Au Grand Séminaire, j’ai rencontré la Grande et la Petite Thérèse, puis Jean de la Croix, François d’Assise, le Curé d’Ars et bien d’autres encore. Dans mon enthousiasme, je reprenais à mon compte le cri d’Ignace de Loyola en lisant la Vie des Saints pendant sa convalescence « Quod isti et istae cur non ego ? » En vous racontant ces souvenirs aujourd’hui, l’homme que je suis maintenant ne peut éviter de se s'interroger sur le sens qu'il donnait aux mots de cette phrase célèbre.
Une première traduction de ce cri nous place sur le terrain de la compétition : « Ce qu’eux ont fait, pourquoi ne le ferais-je pas, moi aussi ? ». Ce terrain pour stimulant qu’il soit - saint Paul ne nous invite-t-il pas à imiter les athlètes qui courent dans le stade et qui tiennent bon jusqu'à la fin de la course (1 Co 10, 24-26) – n’est pas celui qui m'interpellait le plus.
Je constate à plusieurs années de distance que, si j’ai été inspiré toute ma vie par ce cri, c’est que je le comprenais d’une façon différente. En paraphrasant le texte, ma traduction devient : «Ce qu’ils ont fait, tu n’as pas à le refaire, mais pourquoi, toi aussi, ne pas aller au bout de ton engagement comme eux l’ont fait. »
Je crois que c’est ce message que laissaient toutes ces lectures de vies de saints. Imiter François d’Assise, le Curé d’Ars et tant d'autres saints, oui, mais sans vouloir les « cloner », si vous me permettez l’expression, sans bouloir les "singer" ou les reproduire matériellement. Imiter, oui, mais en plongeant au cœur du mystère de la réponse d’amour d’un être qui se laisse habiter totalement par Celui qui nous aime d’un amour tel qu’il nous donne son Fils et fait de nous ses frères et ses amis.
Les saints et les bienheureux de nos contrées et de nos pays ne disent pas autre chose. Pour nous, à Québec, le premier évêque du diocèse qui couvrait alors toute l’Amérique du Nord, sauf le Mexique, le bienheureux François de Laval (1623-1708), est une figure de pasteur extraordinaire qui continue de nous inspirer aujourd’hui. Nous sommes renversés par l’audace de cet évêque missionnaire. Il s’impose de visiter son vaste diocèse à pied, en canot et l’hiver en raquettes sur la neige. Il s’oppose aux commerçants et aux gouverneurs pour défendre les droits et la dignité des amérindiens à qui on donne de l'alcool en échange de leurs fourrures pour les revendre ensuite en faisant d'immenses profits.
Son corps est dans cette basilique-cathédrale. Mort à 85 ans, il a passé 50 ans de sa vie au service des gens d’ici. C’est lui qui a réuni son clergé en une société apostolique de prêtres qui existe encore : la Société des prêtres du Séminaire de Québec et qui est chargée de la formation des futurs prêtres jusqu'à aujourd'hui. Son esprit de détachement lui a fait donner tous ses biens à sa communauté dans laquelle il voulait que tous se regardent comme frères, sans faire aucune distinction de personne. Son idéal, hérité de Monsieur Jean de Bernières à Caen où il avait passé quatre ans comme jeune prêtre, était celui des Actes des Apôtres : une communauté où le partage et le soutien fraternels tiennent une si grande place. Le pape Jean-Paul II l’a proclamé bienheureux le 22 juin 1980.
En cette année 2008, notre communauté des prêtres du Séminaire de Québec, issue de François de Laval, commémore le 300e anniversaire de sa mort et le 350e de son ordination épiscopale à Paris, le 8 décembre 1658. Cette année est pour nous, pour l’Église et pour la société tout entière, une occasion de revisiter cette grande figure de l’histoire du Québec et du Canada.
J’ai été fort heureux de vous présenter sommairement notre fondateur et premier évêque de Québec, mais surtout d'avoir pu vous partager l’élan apostolique et pastoral qui m’anime encore aujourd’hui, cet élan, dis-je, que la fréquentation des saints et des saintes m’inspirent sans cesse.
En terminant, laissez-moi vous lire quelques-uns des conseils que le bienheureux François de Laval donnait à deux jeunes prêtres missionnaires allant sur les bords du Lac Ontario pour hiverner avec les amérindiens en 1668 :
“Qu’ils se persuadent bien qu'étant envoyés pour travailler à la conversion des infidèles, ils ont l'emploi le plus important qui soit dans l'Église; ce qui les doit obliger, pour se rendre dignes instruments de Dieu, à se perfectionner dans toutes les vertus.”
“Qu’ils se souviennent que la semence de la Parole de Dieu affert fructum in patientia (porte du fruit dans la patience). Ceux qui n'ont pas cette patience sont en danger, après avoir jeté beaucoup de feu au commencement, de perdre enfin courage et de quitter l'entreprise.
“Les talents qui font les bons missionnaires, sont:
- Être rempli de l'esprit de Dieu. Cet esprit doit animer nos paroles et nos coeurs. Ex abundantia cordis os loquitur (La bouche parle de l’abondance du cœur ).
- Avoir une grande prudence pour le choix et l'ordre des choses qu’il faut faire.
- …se faire aimer par sa douceur, sa patience et sa charité et se gagner les esprits et les coeurs pour les gagner à Dieu; souvent une parole d'aigreur, une impatience, un visage rebutant, détruiront en un moment ce que l’on avait fait en un long temps."
Et le dernier conseil et non le moindre: “ Il faut un visage joyeux”.
Oui, avoir un visage joyeux car le Christ est ressuscité, Il est vivant. Comme disait Notre Saint Père le Pape BenoÎt XVI à des pélerins de Turin, le 2 juin dernier: “N’ayez pas peur de vous en remettre au Christ: Lui seul peut satisfaire les attentes les plus profondes de l’âme humaine. Qu’aucune difficulté, qu’aucun obstacle ne ralentisse votre amour de son Évangile.”
Merci!
Laudetur Jesus Christus!
Mgr Hermann Giguère, P.H..
Supérieur général du Séminaire de Québec
Le 18 juin 2008
Tiré du site internet Carrefour Kairos, site internet d'Hermann Giguère www.hgiguere.net