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Homélie pour le 3e dimanche du Carême Année C : « Bêcher sans se décourager » (Luc 13, 1-9)

Homélie du 28 février 2016 par Mgr Hermann Giguère P. H., Séminaire de Québec. Séminaire de Québec. Textes: Exode 1-8a.10,13-15, 1 Corinthiens 10, 1, 6.10-12 et Luc 13, 1-9.



Le figuier stérile : bêcher avec persévérance (Crédits photo : Bernadette Lopez, alias Berna dans Évangile et peinture )
Le figuier stérile : bêcher avec persévérance (Crédits photo : Bernadette Lopez, alias Berna dans Évangile et peinture )
Je me suis demandé comme vous le faites probablement vous-mêmes pourquoi la liturgie aujourd’hui nous présente l’épisode célèbre et fondateur du Buisson ardent qui a marqué toute l’histoire de Moïse d’une lumière incomparable en parallèle avec trois scènes de la vie courante au temps de Jésus : deux accidents et un vigneron mal pris avec un arbre qui se meurt.

En me rappelant que nous sommes toujours en Carême sur la route de Pâques avec Jésus, j’ai compris que ces textes viennent soutenir nos efforts de conversion en nous donnant l’heure juste et l'élan pour continuer notre chemin sans nous décourager.

I – Le Buisson ardent

La première lecture nous raconte un épisode célèbre de la vie de Moïse : celui du Buisson ardent comme on l'appelle habituellement. L’expérience de Moïse est inattendue. Elle survient dans les circonstances de la vie quotidienne de Moïse qui garde le troupeau de son beau-père. La visite de l’Ange du Seigneur lui permet de s’arrêter pour découvrir la présence de Dieu lui-même dans ce Buisson qui ne brûle pas, une présence où Dieu se révèle dans son mystère : « Yahvé » qui veut dire en français « Je-suis-celui-qui-suis ».

Cette révélation se double pour Moïse d’une mission à laquelle désormais il ne pourra échapper. Il est chargé d’œuvrer à la libération de son peuple asservi et devenu esclave en Égypte. Et nous le savons, Moïse réussira cette tâche incroyable.

Mais comment la réussira-t-il? En s'appuyant sur son expérience du Buisson ardent qui est celle d’un feu qui ne s’éteint pas. Au cœur de Moïse s’est allumée alors une flamme d’amour qui brûle sans se consumer. L’histoire de la libération du peuple hébreu : traversée de la Mer Rouge, marche dans le désert, révoltes et abandons etc. c'est celle de la mission que Dieu lui a donnée : conduire le peuple hébreu dans la Terre promise qu'il ne connaîtra pas lui-même, mais qu'il verra de loin. Moïse vivra cette mission sans se décourager en s'appuyant sur la présence de son Dieu, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Il est un modèle de persévérance dans la foi.

Notre temps de carême est un temps de marche au désert à l’image de celle du peuple hébreu. Ne laissons pas le découragement et la lassitude prendre le dessus. Au contraire, que l'exemple de Moïse nous inspire. Revenons à ce feu qui a brûlé nos cœurs un jour comme ce fut le cas pour Moïse. Les récriminations, comme le dit saint Paul aux chrétiens de Corinthe dans la deuxième lecture, entraînent loin de Dieu. Laissons la grâce de Dieu faire son travail de transformation en nous, car sa puissance est à l’œuvre aujourd’hui comme hier.

II – Les avertissements de Jésus

Cependant, il faut toujours se rappeler que, si la puissance et la grâce de Dieu peuvent tout, Dieu ne veut pas nous sauver sans nous. Il nous revient de mettre en application ce que dit le vigneron à son maître dans l'évangile : « Bêcher, bêcher sans se lasser ». Saint Ignace de Loyola disait que, dans la vie chrétienne, il faut faire comme si tout dépendait de nous en sachant que tout dépend de Dieu.

Si nous sommes sincères dans nos efforts de conversion pendant le Carême, nous profiterons de ce moment pour nous mettre à une forme d’entraînement spirituel par une fidélité plus grande dans la prière, le partage et le jeûne sous diverses formes. C’est le but des œuvres de miséricordes corporelles et spirituelles que le pape François ne cesse de nous proposer en ce Carême au cœur du Jubilé Extraordinaire de la Miséricorde. Bêcher ne donne pas la croissance, mais l’arbre dont on ne s’occupe pas peut se rabougrir au point de mourir. Il en est ainsi dans notre rencontre avec Dieu. Si les efforts ne sont pas là, nous devenons alors comme un figuier qui dépérit et meurt. « La foi sans les oeuvres est une foi morte » dit la lettre de l'apôtre saint Jacques (Jacques 2, 26) .

Et il y a une certaine urgence d'agir, ce que Jésus rappelle fortement en relevant les deux accidents qui se sont produits à Jérusalem lors de son passage dans la ville : les Galiléens massacrés par le procurateur romain, Pilate, qu’on retrouvera plus tard au procès de Jésus et les 18 personnes tuées par la chute de la tour de Siloé. Ses paroles sont mêmes un peu dures : « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux ».

Cette invitation pressante n’a pas comme but de nous forcer la main, mais elle souligne que c’est notre liberté qui est en cause. Personne ne peut décider à notre place d’ouvrir la porte à la visite de Dieu qui se produira bien souvent de façon inattendue comme il est arrivé à Moïse.

III – Aujourd’hui, Dieu passe

C’est le message à retenir, je pense, de ces textes de la liturgie du 3e dimanche du Carême de cette année : l’ouverture aux surprises de Dieu dans nos vies en y allant patiemment, en bêchant sans nous décourager. Dieu se manifestera au bon moment soyons-en sûrs.

Bêcher, c'est s'arrêter un peu de temps à autre pour faire le point et pour prier dans le secret comme on nous y invitait lors du Mercredi des Cendres ?

Rendu au milieu de notre carême, nous pouvons regarder en arrière et nous décourager peut-être, mais il est beaucoup plus utile de regarder en avant et d’aller avec confiance à la suite de Jésus.

Avec lui nous nous laissons entrer dans le plan de Dieu sur nous et sur toute l’humanité qu’il veut de plus en plus belle, généreuse et ouverte. En effet, Dieu a envoyé son Fils Unique pour que nous ayons la vie et que nous l’ayons en abondance (Jean 10, 10). Les revers, les difficultés rencontrées n’auront jamais le dessus sur cet volonté salvifique de Dieu qui nous aime tous et toutes comme ses enfants bien-aimés sur qui il répand avec abondance son amour miséricordieux. La plus grande tentation serait celle de la résignation qu'a dénoncée le pape François dans une très belle homélie au Mexique. Voir le texte à la fin.

Conclusion

Que cette Eucharistie, nous trouvent attentifs comme Moïse aux paroles et aux inspirations que l’Esprit Saint met dans notre cœur. Et ainsi nous arriverons à Pâques avec des cœurs nouveaux et des esprits nouveaux. C’est la grâce que je vous souhaite à tous et à toutes. Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

24 février 2016






Du pape François à la Messe avec les prêtres, les consacrés et les séminaristes à Morelia (Mexique) le 16 février 2016

Le pape se demande quelle tentation pouvons-nous avoir face à notre monde qui semble devenir un système inamovible et sans âme et il répond : « Je crois que nous pourrions la résumer en un seul mot: résignation. Et face à cette réalité, l'une des armes préférées du démon, la résignation, peut nous tenter. Et que pouvons-nous y faire? La vie est ainsi. Une résignation qui nous paralyse et nous empêche non seulement de marcher, mais aussi de faire du chemin; une résignation qui non seulement nous effraie, mais qui nous fait aussi nous retrancher dans nos sacristies et dans nos sécurités apparentes; une résignation qui non seulement nous empêche d'annoncer, mais qui nous empêche aussi de louer, nous retire l'allégresse, la joie de louer. Une résignation qui non seulement nous empêche de prévoir, mais qui nous empêche aussi de prendre des risques et de transformer. Par conséquent, Notre Père, ne nous laisse succomber à la tentation. Qu'il nous fait du bien de recourir, dans les moments de tentation, à notre mémoire! Comme cela nous aide de regarder l'étoffe dont nous sommes faits. Tout n'a pas commencé avec nous, tout ne finira pas non plus avec nous, c'est pourquoi cela nous fait du bien de récupérer l'histoire qui nous a conduits jusqu'ici! »

« Et dans ce souvenir, nous ne pouvons pas passer sous silence une personne qui tant aimé cet endroit, qui s'est fait fils de cette terre. Une personne qui a su dire d'elle-même: Ils m'ont arraché à la magistrature et ils m'ont placé au timon du sacerdoce à cause de mes péchés. Moi, inutile et entièrement inapte pour l'exécution d'une si grande entreprise; moi, qui ne savais pas manier la pagaie, ils m'ont fait premier évêque de Michoacán ».

« Avec vous, je voudrais faire mémoire de cet évangélisateur, connu également comme Tata Vasco, comme l'espagnol qui s'est fait indien. La réalité que vivaient les indiens Purhépecha décrits par lui comme vendus, harcelés et errants dans les marchés, recueillant les miettes jetées au sol, loin de le conduire à la tentation et à la paresse de la résignation, a stimulé sa foi, a stimulé sa vie, a stimulé sa compassion et l'a incité à réaliser divers projets qui ont donné du souffle face à cette réalité si paralysante et injuste ».

Homélie pour le 3e dimanche du Carême Année C : « Bêcher sans se décourager » (Luc 13, 1-9)

Mardi 23 Février 2016
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