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Le Carême, un passage au désert - Homélie pour le Mercredi des Cendres (17 février 2010)

Homélie pour le Mercredi des Cendres au Séminaire de Québec, 17 février 2010 Année C, par le Supérieur général, Mgr Hermann Giguère P.H. Textes de l'Écriture: Joël 2, 12-18; II Corinthiens 5, 20-6,2 et Mathieu 6, 1-6.16-18.



Le désert de Juda en Palestine (Domaine public)
Le désert de Juda en Palestine (Domaine public)
Méditation reprise en 2016. "Ne vous méprenez pas, le désert c’est essentiel dans la Bible, mais le désert n’est pas un but, le désert c’est beau à condition qu’on en sorte" Méditation sur le sens du temps du carême (H.Giguère)

J’avais intitulé mon homélie : « Le Carême, un retour au désert », mais après avoir médité ce titre et revu les textes de la liturgie du Carême pour l’Année C, je me suis rangé très volontiers derrière un de nos anciens professeurs de Bible, le Père Évode Beaucamp, qui avait l’habitude de dire : « Mes amis, ne vous méprenez pas, le désert c’est essentiel dans la Bible, mais le désert n’est pas un but, le désert c’est beau à condition qu’on en sorte ».

Cette réflexion donnera le ton à notre méditation aujourd’hui.

I- Le désert, un lieu hostile

Dans l’Ancien Testament, le désert regorge de pièges. Il est habité par les démons (Lévitique 16,10). C’est le lieu où rôdent le Malin et les bêtes malfaisantes (Isaïe 13,21).

Ce n’est pas un lieu où l’on désire se retirer, si ce n’est pour affronter ces forces mauvaises qui mettent à l’épreuve celui qui s’y risque. Cette terre désolée s'oppose à la Terre promise, comme la malédiction à la bénédiction.

De même le désert écrase les voyageurs qui s’y retrouvent affamés et assoiffés. Pensez au peuple d’Israël avant qu’apparaissent les cailles et la manne. Pensez à Elie en marche vers l’Horeb (I Rois 19, 8).

Oui, le désert ne peut pas être un but comme disait le Père Beaucamp. Israël y a vécu quarante ans et il en est sorti pour découvrir un pays où coulaient le lait et le miel. Moïse n’a fait qu’entrevoir ce pays. C’est Josué qui y a introduit le peuple d’Israël.

Et pourtant, le désert n’a-t-il pas été un passage extraordinaire où Israël, sauvé de l’Égypte par la main de Dieu, a appris à connaître son Dieu, à lui faire confiance, à se remettre entièrement à lui? Ainsi le désert dans la Bible n'est pas seulement une terre de désolation, c'est aussi et surtout un lieu où s’accomplit l'histoire du salut. Car, si Dieu a voulu faire passer son peuple par cette "terre affreuse" (Deutéronome 1,19), c'est pour le faire entrer dans la Terre Promise.

Voilà la face cachée du désert que les prophètes d’Israël vont chanter et se remémorer avec nostalgie comme le temps des fiançailles de Dieu avec son peuple, le temps de « ton amour de jeune mariée, lorsque tu me suivais au désert » (Jérémie 2, 2), le temps où Dieu le soulevait comme un nourrisson tout contre sa joue nouant avec lui des liens de tendresse et d'amour (Osée 11, 4).

II- Le désert, le lieu de la rencontre de Dieu

Sur cette lancée, le désert n’apparaît plus comme un lieu hostile, il devient un lieu propice à la rencontre de Dieu.

Pourquoi ? Parce qu’il ramène à l’essentiel. Le dénuement de tout, l’insécurité du lendemain, l’horizon lointain ramènent celui qui s’y lance vers lui-même. Il ne peut s’appuyer ses moyens habituels. Il est dépouillé à l’extrême. Et ainsi son cœur s’ouvre à l’Autre au-delà de lui-même, à cette dimension intérieure qui parfois était obnubilée par le bruit et les activités de toutes sortes. C’est ce que le peuple d’Israël a vécu. C’est ce que nous vivons en « faisant désert », en choisissant de passer au désert nous aussi.

Ramené en nous-mêmes, nous nous retrouvons seuls, mais non pas abandonnés. Nous découvrons une Source d’où surgit la vie. Si l’eau fait défaut, la Parole de Dieu, parole de vie, jaillit en abondance. Notre cœur peut se laisser habiter et nous pouvons renaître.

Voilà, un passage qui nous est offert cette année dans le temps de la Sainte Quarantaine. Chaque année, le premier dimanche du Carême nous présente Jésus qui affronte ce défi de passer au désert. Il en sort muri et prêt pour une mission qui l’établira, par la mort et la résurrection, Seigneur pour la gloire du Père, puissant pour nous sauver (Romains 1, 5).

III- Application

En ce jour du Mercredi des Cendres, notre regard se porte en avant. La liturgie de l’Église nous invite encore à nous tourner vers l’intérieur de nous-mêmes : « Ton père qui voit dans le secret te le rendra ». Ce mouvement vers l’intériorité fait partie de notre passage au désert. Il nous permet d’aller au fond de nous-mêmes, de faire le point, de vivre un abandon à Dieu renouvelé. C’est pourquoi, j’utiliserai tout à l’heure la formule « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile » pour accompagner le geste de l’imposition des Cendres.

Oui, c’est dans nos déserts que Dieu se fait pédagogue et maître de vie. Ces déserts prennent diverses formes : insatisfactions, doutes, nuits, tristesse, maladies, solitude, manque, indigences de toutes sortes. Mais comme pour Israël, c’est là que Dieu nous attend cette année pendant notre Carême. "Se convertir au Christ, croire à l'Évangile, écrit le pape Benoît XVI dans son Message du Carême pour 2010, implique d'abandonner vraiment l'illusion d'être autosuffisant, de découvrir et accepter sa propre indigence..."Ouvrons nos cœurs et disposons-nous à accueillir ce temps de grâce du Carême. Dans les textes liturgiques de l'année C, l'accent est mis sur la conversion et la pardon : appel de Jésus à la conversion (Luc 13, 1-9); parabole du père et des deux fils (Luc 15, 1-3. 11-32); évangile de la femme adultère (Jean 8, 1-11).

En recevant les Cendres sur nos têtes, reconnaissons que nous avons encore à parcourir une longue marche dans le désert. Le passage à travers celui-ci n’est pas terminé. Nous savons dans la foi que nous verrons la terre nouvelle et les cieux nouveaux un jour « car la cité que nous avons ici-bas n'est pas définitive : nous attendons la cité future » (He 13, 14). Nous les attendons comme Moïse qui a espéré la Terre promise toute sa vie. « Mais c’est de nuit », selon l’expression de saint Jean de la Croix dans le merveilleux poème « La Source ». C’est dans la foi que nous attendons et que nous cheminons à travers nos passages au désert, le cœur rempli d’espérance et les yeux tournés vers en avant.

Conclusion

Le geste de l’imposition des cendres et notre Eucharistie nous plongent au cœur de l’attente. Pourquoi ? Parce qu’ils nous redisent notre condition d’homme, mortel, limité, marqué par la finitude qui a le regard tourné vers l’infini qu’il connaît dans la foi et qu’il annonce à la suite de Celui qui est passé de la mort à la vie, et qui vit maintenant éternellement « pour Dieu ». « Car lui qui est mort, c'est au péché qu'il est mort une fois pour toutes; lui qui est vivant, c'est pour Dieu qu'il est vivant ». (Romains 6, 10)

Que notre célébration d’entrée en Carême cette année nous ouvre de nouveaux horizons et qu’elle nous fasse entrer avec joie sur le chemin d’éternité. Comme le dit si bien le thème du Carême de cette année choisi par l’équipe du Prions en Église canadien : « Dieu tient parole: confiance! »

Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Supérieur général du Séminaire de Québec
Le 17 février 2010.





Avec toi nous irons au désert

Texte : J. Servel Musique: Joseph Gélineau Fiche G229

Seigneur avec toi nous irons au désert,
Poussés, comme toi, par l'Esprit (bis)
Et nous mangerons la parole de Dieu,
Et nous choisirons notre Dieu.
Et nous fêterons notre Pâque au désert :
Nous vivrons le désert avec toi !

Seigneur nous irons au désert pour guérir
Poussés, comme toi, par l'Esprit (bis)
Et tu ôteras de nos cœurs le péché,
Et tu guériras notre mal,
Et nous fêterons notre Pâque au désert :
O vivant qui engendre la vie !

Seigneur nous irons au désert pour prier
Poussés, comme toi, par l'Esprit (bis)
Et nous goûterons le silence de Dieu,
Et nous renaîtrons dans la joie.
Et nous fêterons notre Pâque au désert :
Nous irons dans la force de Dieu !


Samedi 13 Février 2010
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